18 septembre 2025
Catégorie
Le Journal de Nicolas Houle
Types
Nouvelle
Écrit par : Nicolas Houle
Le Palais Montcalm a désormais une nouvelle organiste en résidence! Marie-Hélène Greffard succède à Richard Paré, qui tenait ce rôle depuis huit ans. Cette passation des pouvoirs se concrétisera pleinement lors d’un concert gratuit, le 28 septembre, dans la salle Raoul-Jobin, où les deux organistes partageront la scène avant de faire place du Duo Éole.
Faut-il le rappeler, le Palais Montcalm a été la première salle de spectacle au Québec à se doter d’un grand orgue. C’est Richard Paré, cofondateur des Violons du Roy, organiste et claveciniste, en plus d’être enseignant à l’Université Laval, qui avait inauguré l’orgue en 2013. Il était devenu l’organiste en résidence quatre ans plus tard.
Or l’heure est venue de passer la main et c’est maintenant au tour de Marie-Hélène Greffard de veiller à la programmation de concerts et d’événements spéciaux impliquant l’orgue, en collaboration avec l’équipe du Palais Montcalm, à des projets d’enregistrement, à des activités de médiation et de démocratisation de l’orgue ainsi que de superviser l’entretien de cet imposant instrument, qui est le 3896e issu des ateliers Casavant Frères, situés à Saint-Hyacinthe.
« Richard a été mon professeur pour mes dernières années d’études à l’Université, raconte-t-elle. (…) Il est resté mon mentor! Dans les dernières années, même si j’ai terminé il y a bientôt 20 ans, Richard a toujours été là pour répondre à mes questions. Depuis deux ans, il m’a laissé sa place pour jouer au concert du Chemin de Noël. Il trouvait naturel que je continue dans ses traces pour devenir organiste en résidence du Palais Montcalm. Comme je suis une de ses anciennes étudiantes, je pense que c’était une fierté pour lui. Il voyait aussi que j’avais à la fois la capacité de jouer et des aptitudes de communication pour bien vulgariser mon métier. »
Comme elle aime le raconter, un sourire dans la voix, Marie-Hélène Greffard a déjà dit « non » au grand orgue lorsqu’elle était toute jeune. Sa première professeur avait tenté de l’initier à l’instrument, en vain. Elle préférait le piano! C’est donc sur le tard, pendant qu’elle étudiait au Conservatoire de musique de Québec, qu’elle s’est intéressée à l’orgue. Elle a eu un véritable coup de cœur.
«Je trouvais ça le fun de jouer avec mes pieds. Ça ajoutait la difficulté de lire une troisième portée pour une pianiste, mais ça donnait accès à un tout autre répertoire. J’ai aussi dû apprendre à toucher l’orgue correctement (…) parce qu’à l’orgue tout se fait avec les doigts. J’aime dire que chaque note est une décision que l’on prend et c’est encore plus vrai avec le répertoire baroque : c’est tout un art de détacher ou de lier certaines notes pour donner de la vie à notre jeu.»
Preuve qu’elle a su s’accaparer l’instrument, Marie-Hélène détient une maîtrise en interprétation de l’Université Laval et a raflé une foule de récompenses, dont le premier prix au Concours d’orgue de Québec et la Médaille d’or de la Gouverneure générale. Ce qui est particulier dans son parcours, c’est qu’elle a su s’illustrer tout autant au piano -elle détient aussi une maîtrise en interprétation- et est donc parfaitement à l’aise sur l’un ou l’autre des claviers.
«Habituellement, les organistes ont fait du piano dans leur jeunesse, mais après ils embarquent sur l’étude de l’orgue, note-t-elle. (…) Une grande partie de ma vie de tous les jours est d’être pianiste-accompagnatrice : j’accompagne des chanteurs d’opéra, j’accompagne des chœurs. J’ai donc une double identité musicale de pianiste et d’organiste. Il n’y en a pas beaucoup qui sont capables de faire à un aussi haut niveau sur les deux instruments – je dis ça bien humblement. »
En devenant organiste en résidence au Palais Montcalm, Marie-Hélène Greffard vient aussi tenir un rôle qui, à une certaine époque, était réservé aux hommes. Or au fil des ans, bon nombre de femmes ont fait leur place et ont su s’imposer comme des incontournables dans le milieu, mettant de l’avant leur propre personnalité.
« Je lisais que [l’organiste anglaise] Anna Lapwood s’était déjà fait dire lors d’un concours en Europe qu’elle devrait jouer plus comme un homme et ça l’avait fâchée énormément, raconte Marie-Hélène. Elle répond à ça aujourd’hui en mettant l’accent sur le côté féminin, notamment en ce qui a trait au répertoire et en valorisant la place des femmes dans le milieu classique et, plus précisément, celui de l’orgue. »
Lors du concert du 28 septembre prochain, Marie Hélène jouera quelques pièces en compagnie de Richard Paré, après quoi elle sera rejointe par son collègue Frédéric Quinet à la trompette, avec lequel elle forme le Duo Éole. Ensemble, les deux complices toucheront à des pièces allant de Rameau à la musique du Seigneur des Anneaux, signée Howard Shore.
Et pour la suite, que nous réserve la nouvelle organiste en résidence du Palais Montcalm?
« Mon plus grand souhait pour l’instant est de faire le pont entre l’instrument et le public. De proposer des activités du côté de la médiation culturelle, expliquer l’abc d’un orgue. Il y a plein de choses que les gens ne savent pas, comme les souliers d’orgue ça vient d’où, à quoi ça sert? C’est un instrument méconnu. (…) Les gens ne savent pas toute la palette sonore qu’on peut exploiter. J’aimerais démocratiser l’instrument, faire connaître les secrets, ce qui est spécifique, beau et unique à propos de notre orgue au Palais Montcalm… »