RCM, le trio atypique

18 novembre 2022

Catégorie Le Journal de Nicolas Houle
Écrit par : Anne-Louise Champagne

RCM, le trio atypique

Le grand orgue Casavant. Des percussions réinventées. Une guitare électrique qui applique la couleur du rock progressif. Le trio RCM revient en spectacle avec sa formation unique, le 2 décembre, au Palais Montcalm.

Les amateurs renoueront avec des classiques comme Tubular Bells de Mike Oldfield ou Close to the Edge, de Yes, mais à la façon RCM. Yves Rechsteiner, l’organiste au centre du projet, promet « une soirée extrêmement festive! »

De l’aveu même de son fondateur, le trio RCM est tout à fait atypique. « Pour l’instant, je ne connais aucun équivalent ailleurs qui fasse ce genre de musique, dans cette formation. » RCM? R pour Yves Rechsteiner (orgue), C pour Charles-Henri Caget (percussions) et M pour Frédéric Maurin (guitare électrique).

Mais attardons-nous à la petite histoire du trio. Au départ, Rechsteiner baignait plutôt dans la musique classique et baroque. C’est en faisant des arrangements sur les œuvres du compositeur français Rameau qu’il a eu envie d’ajouter un percussionniste. « Je trouvais que les danses et les opéras du dix-huitième siècle prenaient une couleur beaucoup plus vive.»

L’idée était solide puisque, 15 ans plus tard, le percussionniste en question, Charles-Henri Caget, est toujours aux côtés de Rechsteiner.

Le virage Zappa

Avec la musique baroque, Rechsteiner jouait en terrain familier. Il a fallu Frank Zappa pour le sortir de cette zone de confort.

Ça se passait en 2013. Il connaissait très peu Zappa, mais la rencontre avec la musique du prolifique compositeur a été un coup de cœur. Avec son complice percussionniste, il a mené ses recherches musicales et créé un premier programme autour de la musique du grand Frank, toujours en duo. Jusqu’à ce qu’ils voient se produire sur scène le guitariste Frédéric Maurin, invité par l’orchestre symphonique de Toulouse. Séduits, ils l’invitent à jouer avec eux sur deux pièces de Zappa, lors de leur concert du lendemain! « C’était trop génial! La guitare, c’est ce qui nous manquait!», affirme Rechsteiner.

C’est ainsi que, en 2014, le trio trouve sa forme actuelle. D’ailleurs, les mélomanes québécois ont eu l’occasion d’entendre le Projet FZ en 2018, au Palais Montcalm.

Progressif et symphonique

Qu’est-ce qui fait passer un organiste du classique au progressif? Pour Rechsteiner, deux points importants: la longueur et le développement musical d’une part, et la richesse de l’orchestration d’autre part. Exemple: « Je me réjouis de jouer Close to the edge. La richesse sonore de la pièce originale est fantastique et elle est extrêmement inspirante pour notre groupe.

« C’est pareil pour Tubular Bells, qui dure 60 minutes, mais dont nous allons jouer la première partie, qui en fait 25. C’est une musique qui est très développée, très au-delà des standards de chansons rock traditionnelles. »

Le choix des pièces se fait au rythme des coups de cœur de chacun, même si Yves Rechsteiner admet qu’il est « pas mal la locomotive du projet! ». Pour Tubular Bells, par exemple, la forme musicale qui revient en boucle, en incluant différents instruments à tour de rôle, lui a rappelé le Boléro de Ravel. « Pour l’orgue, c’est génial. Vous pouvez faire tourner la boucle et à chaque fois faire entendre un jeu différent de l’orgue. Ça permet de montrer la richesse de l’instrument. »

Un trio créatif

Si Yves Rechsteiner se décrit comme la « locomotive du projet », il souligne par ailleurs la créativité de ses collègues. Charles-Henri Caget a commencé sa carrière dans la musique classique également, tout en s’intéressant à la création dans plusieurs genres musicaux. Mais ça va plus loin.

Son site web mentionne qu’il est -entre autres choses- « concepteur d’instruments ». « À chacun de nos programmes, en fonction de la musique, il compose un set de percussions particulier. Pour Zappa, il avait un ensemble de percussions tout à fait unique et pour le rock prog, il ajoute de nouvelles percussions, qui sont tout à fait différentes de celles de la musique baroque.»

Frédéric Maurin, pour sa part, est également compositeur et il est, depuis 2018, le directeur artistique de l’Orchestre national de jazz en France. Il a, dit son collègue Rechsteiner, « une pensée de compositeur, qui imagine des choses nouvelles, qui crée, qui met son imaginaire au service de ses programmes et de sa musique. »

Le défi de la balance

Pour le trio, le défi en concert consiste à trouver une bonne balance avec l’orgue. Le premier problème, explique Yves Rechsteiner, c’est qu’il est encastré au fond de la salle, et que l’émission sonore est extrêmement directe. La deuxième chose, c’est qu’il a une palette dynamique « monstrueuse ». Il peut jouer extrêmement doux, et extrêmement fort. « La difficulté pour mes collègues est de s’adapter à cette palette et moi, de m’adapter à eux.» Et après, de gérer la différence de projection de son.

« Fred joue avec une guitare électrique et l’amplificateur est très proche du public. Le 2 décembre, je crois que nous allons légèrement reprendre le son de l’orgue dans les hauts-parleurs de façade, pour pouvoir mettre les trois instruments dans le même plan. C’est important pour avoir une belle présence auprès du public. »

Tout ça pour assurer un concert aux multiples facettes. « Même si c’est du rock, il y a des moments extrêmement planants, relate Rechsteiner. On n’est pas loin des musiques minimalistes dans Tubular Bells. Dans Close to the Edge, il y a un moment de poésie infinie au milieu. Et en même temps, il y a des trucs très roots, très rock, avec une rythmique d’enfer, où l’orgue va à toute vapeur et où la guitare tient son rôle de base. C’est un programme dont j’apprécie vraiment la variété! »